Ta journée classique

Publié le par lilipoutchi

Tu te lèves encore endormi.
T'as rêvé que t'avais pas de boulot.
Dèsfois tu te dis que tu devrais rattaquer la fumette. Au moins tu te souviendrais pas de tes rêves.

Des rêves t'en fais un peu trop la nuit.
Ca compense le manque de fantaisie que te procure une journée face à un ordi, à naviguer parmi des offres qui ne correspondent jamais vraiment. Dommage tu n'as pas 8 ans d'expérience. Tu viens d'être diplomé. Tu ne parles pas Chinois. Tu n'as pas de spécialisation en marketing dans le domaine du soulier vernis pour enfant.
Et puis il y a des limites à ce que tu es prêt à accepter. Tu es sans doute vieux jeu.

Tu passes ainsi une journée avec ton écran comme seul interlocuteur valable. Tu te demandes dèsfois comment il va lui, à voir défiler la même chose que tes yeux.
Vous parlez peu tous les deux.

Que se dire dans ces cas la ?

Vous sentez tous les deux qu'il y a comme une tension. Pourtant les mails de candidature s'envolent les uns après les autres, dans un ballet multicolore. Il y a de la joie et de la volupté !


La réponse est unique. Et terne :

"Monsieur,

Vous êtes très bon.
Pourtant on ne a trouvé mieux que vous.
Mais vous êtes quand même très bon.

Soyez sur qu'on vous contactera, cher monsieur très bon, si on a besoin de vos super pouvoirs."


Dans ce cas là, ce sont les espoirs qui s'envolent.
Ca doit être la période de la migration, ils se barrent tous en ce moment.

Dèsfois tu as la chance de voir des gens, des vrais, pas des RH dont tu ne connaitras jamais que le nom.
Perdu dans tes pensées, dans ta recherche, tu as un peu de mal à sortir de ton carcan. A descendre de ta tour d'ivoire pleine de bureaux de l'ANPE. Tu te sens mal quand on te demande ce que tu fais, tu as toi même du mal à le définir. Tu ne fais pas rien. Tu cherches.
 Si eux bossent, tu les envies.
S'ils ne bossent pas non plus, votre discussion ressemble parfois un ballet funèbre dans lequel vous vous enlacez, compatissants, et sombrez vers les abysses.
D'autres fois vous ironisez, positivez, regardez les bons côtés parce qu'il y en a.

La culpabilité en prend un coup.

Tu en reprendrais bien un aussi.


Ce soir tu as du mal à dormir. Comme hier. Comme le jour d'avant.
Ta vie est paradoxale. Ton cerveau tourne lentement la journée, et il accélère le soir.
Comme le ventilateur de ton très cher ordi, il tourne en rond. Il brasse du vent.


Alors tu te dis que tu devrais rattaquer la fumette.
Au moins tu pourrais dormir.
Dormir sans rêver.
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article